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Angélique témoigne (Franche-Comté)

Je m’appelle Angélique, et aujourd’hui j’ai 33 ans. Je fais partie des endogirls « chanceuses » que la maladie n’empêche de vivre au quotidien, à part quelques petites adaptations. Cependant, bien qu’elle ne soit pas handicapante, elle m’a tout de même bien compliquée la vie et mon épanouissement.

 

J’ai eu mes règles à 12 ans et j’ai été mise sous pilule très vite, par mon médecin traitant. Mes règles ont toujours été abondantes, mais je ne le savais pas, parce qu’on ne parle pas de ses règles. Ni avec ses sœurs, ni avec sa mère, ni avec ses copines. Pour moi, c’était normal de mettre des serviettes « nuit » plusieurs fois par jour.

 

Je n’avais pas de règles douloureuses mais j’ai quand même fait plusieurs séjours aux urgences pour des problèmes de constipations, sans jamais faire le rapport avec mes règles. Toujours la même routine : intraveineuse de spasfon, radios, lavements et retour à la maison. « Votre fille est stressée, c’est tout ». Et vu mon contexte familial et mes relations catastrophiques à l’école, ça passer facilement et je me suis fait une raison.

 

Ma vie intime était également compliquée. La douleur, durant la pénétration, surtout au fond du vagin, et après avoir pris du plaisir, et la fatigue continuelle, ont rendu mon épanouissement sexuel difficile. J'ai dû faire face à l'incompréhension de mon ex-conjoint qui a longtemps cru que je ne le désirais pas, que j'étais frigide.

 

Alors entre ça et les problèmes de transit, tabous et pas très glamours, j’ai eu beaucoup de mal à me construire en tant que femme. Pendant des années, j'ai donc construit une image dégradée de moi. Je me sentais nulle, sale, pas féminine, faible... Et mon entourage ne m'aidait pas à prendre conscience du contraire.

 

Puis un jour, lorsque j’avais 23 ans, j’ai été prise de violente douleurs lombaires et abdominales, bien plus fortes que d’habitude. Après avoir attendu toute la journée que ça passe et fait un lavement (prescrit par les urgences 15 jours avant), j’ai fini par me rendre aux urgences sur le conseil du SAMU pour faire une échographie (enfin) : mon rein était compressé par une masse extérieure mais invisible aux examens (et encore plus aux radios des intestins). J’avais les mêmes douleurs que des calculs rénaux. Je suis restée 3 jours et ils m’ont posé une sonde JJ pour évacuer les urines de mon rein et me soulager, le temps de pouvoir échanger avec les autres services. Puis ils m’ont orienté vers le chef de service gynécologie, super médecin qui connaît bien l’endométriose. Après 1h de consultation très douloureuse qui a permis de localiser la lésion, les deux chirurgiens ont optés pour une chirurgie dans les 2 mois, sans examens complémentaires.

 

Ça reste un épisode très traumatisant pour moi. Les mauvaises rencontres médicales (infirmières des urgences agressives, interne très gênée de me demander d’enlever ma culotte, un BIIIPPP de gynécologue d’urgence qui m’a fait ma 1er échographie « par en bas » sans m’expliqué ce que c’était, …) n’ont rien arrangée au stress de l’inconnu (même les chirurgiens ne savaient pas ce qu’ils allaient faire durant l’intervention et l’anesthésiste m’a décrit le pire scénario) et au post-opératoire difficile.

 

Résultat : 5h d’opération au lieu de 3h grand max, coelioscopie suivie d’une laparostomie au-dessus du pelvis pour m’enlever une partie de la vessie à droite, réveil difficile car ma température était trop basse, morphine, perfusions et tuyaux partout, transfusion sanguine, et 3 semaines d’hospitalisation dont la moitié très douloureuse à cause de caillot qui me « défonçaient » la vessie et un premier pipi très compliqué.

 

Ensuite, j’ai été mise sous ménopause artificielle pendant 6 mois… J’ai eu mes règles pendant 4 mois car mon ovaire droit ne voulait pas se mettre au repos, et s’est relancé direct après l’arrêt du traitement. La ménopause c’est juste formidable, mais avec les règles en plus, c’est un pur bonheur : bouffées de chaleurs, irritabilité, douleurs, fatigues, saignements, prise de poids, … Le rêve.

Et suite à cela, j’ai dû aller voir un oncologue car il y avait une masse sur le dernier scanner que j’ai fais qui inquiétait mon urologue mais après consultation de mon gynéco, il s’avère que c’était une « bosse » interne dûe à l’opération, que j’ai toujours, 8 ans après.

 

En tout, 1 an de parcours pour cette opération là. Mais le positif, c’est que j’avais ENFIN un mot sur mes maux : ENDOMETRIOSE.

 

Pour ma part, le diagnostique a été une délivrance car j’ai pris conscience, après des recherches, que tout ce qui me répugner en moi n’était pas de ma faute mais dû à la maladie dont je n’étais pas responsable. Non seulement, mon entourage devait le comprendre et l’accepter, mais moi je devais m’aimer et ne plus avoir honte d’en parler.

Mais ce diagnostic m’a aussi fait vivre avec une épais de Damoclès sur la tête et m’a poussé dans mon parcours pour avoir un enfant. Un parcours où, à cause de l’endométriose, je me suis mis une pression inutile.

 

J’ai fais une seule tentative en PMA (procréation Médicalement Assistée) pour une insémination qui s’est terminée par une réussite. Mais malheureusement, pour des raisons indépendantes à l’endométriose et non liées l’une à l’autres, ma fille souffrait d’une malformation irréparable donc j’ai fais une interruption médicale de grossesse à 3 mois. J’ai eu deux fausses couches par la suite, en 1 an, puis plus rien depuis.

Episode de ma vie très douloureux mais qui m’a permis, 3 ans après, d’ouvrir mes yeux sur mon pseudo couple.

 

Ma 2e chirurgie a eu lieu 6 ans après la première. Bien moins impressionnante, j’ai sous-estimé son impact psychologique. En effet, j’ai eu une cœlioscopie qui a duré 1h et je suis sortie le lendemain. Mais par contre, si les lésions étaient moins grosses, elles m’ont tout de même bien abîmées et certaines étaient dû à la cicatrisation de ma 1er chirurgie (tissus cicatriciels qui m’ont abîmé ovaire et trompe à droite). Si j’ai toujours mon ovaire, c’est pour m’aider dans le cadre d’une FIV. Et, c’est peut être idiot, mais ça à remonté en moi des souvenirs, des peurs, l’épée de Damoclès, …

 

Aujourd’hui, j’ai changé de vie, car l’endométriose m’a demandé quelques aménagements. Mais malgré les épreuves qu’elle m’a mises sur la route, j’apprends, grâce à l’endométriose, à être moi, enfin, et je l’a remercié. C’est paradoxal, je sais. Mais ce sont ces épreuves qui m’ont permis de comprendre que je devais rester ma priorité et rester moi-même, quitte à faire du tri autour de moi. J’ai changer d’homme, de boulot et d’association, tout ce qui était nocif à mon épanouissement pour apprendre à m’accepter et à m’affirmer. Et je prends plus soin de moi et de mon âme, en arrêtant de sous-estimer mes souffrances, pour enlever les différents blocages qui se sont insidieusement installés au fil des années, comme l’endométriose. Car pour aider les autres, il faut déjà s’aider soi même.

 

 

 

Alors n’oubliez jamais que vous êtes une warrior et vous méritez de vous aimer et de vous respecter, même avec une endométriose. D’autant plus avec une endométriose.